Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

supérieurs à ceux de leurs pays, mais encore de remplir leur trésor[1] au moyen des droits d’entrée et de sortie, et d’accoutumer au travail des sujets adonnés à la paresse, à la débauche et aux rixes, ces princes considérèrent comme une bonne fortune que les Anséates fondassent chez eux des comptoirs, et ils les y encouragèrent par des privilèges et par toutes sortes de faveurs. Les rois d’Angleterre se signalèrent particulièrement sous ce rapport.

« Le commerce anglais, dit Hume, était alors tout entier entre les mains des étrangers et particulièrement des Esterlings[2], que Henri III avait organisés en corporation, dotés de privilèges et affranchis des restrictions et des droits d’entrée auxquels les autres marchands étrangers étaient assujettis. Les Anglais avaient alors si peu d’expérience commerciale, qu’à partir d’Édouard II les Anséates, connus sous le nom de marchands de Stahlhoff, monopolisèrent tout le commerce extérieur du royaume. Comme ils n’employaient que leurs bâtiments, la navigation anglaise se trouva réduite à l’état le plus misérable[3].

Longtemps avant cette époque, des marchands allemands isolés, de Cologne notamment, avaient trafiqué avec l’Angleterre ; ce fut en 1250 qu’ils établirent enfin à Londres, sur

  1. A cette époque, les rois d’Angleterre retiraient plus de revenus des exportations que des importations. La libre exportation et l’importation restreinte, surtout l’importation des objets fabriqués, supposent une industrie déjà avancée et une administration éclairée. Les gouvernements et les peuples du Nord étaient alors à peu près au même degré de culture et de science administrative où nous voyons aujourd’hui la Sublime Porte. On sait que le Grand Seigneur a récemment conclu des traités de commerce dans lesquels il s’engage à ne pas percevoir à l’exportation des matières brutes ou des produits fabriqués au delà de 12 pour 100 de la valeur, et à l’importation, au delà de 5 pour 100. Dans ses États, par conséquent, le système de douane qui se préoccupe avant tout du revenu de l’État, est en pleine vigueur. Les hommes d’État et les écrivains qui poursuivent ou défendent ce système devraient se rendre en Turquie ; ils s’y trouveraient tout à fait à la hauteur de leur époque.
  2. Les Anséates étaient alors appelés en Angleterre Esterlings ou marchands de l’Est, par opposition à ceux de l’Ouest, c’est-à-dire aux Belges et aux Hollandais.
  3. Hume, Hist. d’Angleterre, chap. xxxv.