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Dans le cours des cinquante dernières années, ou plutôt des vingt-cinq dernières (car il est difficile de tenir compte de la période de révolution et de guerre), la France a expérimenté en grand le système des restrictions avec ses erreurs, ses excroissances et ses exagérations. Le succès de l’expérience est manifeste pour tout esprit impartial. Que la théorie le mette en question, elle le doit, pour être conséquente avec elle-même. Quand elle a pu avancer et persuader au monde cette assertion audacieuse, que l’Angleterre est devenue riche et puissante en dépit et non à cause de sa politique commerciale, comment hésiterait-elle à soutenir une thèse beaucoup plus facile à établir, à savoir que, sans protection pour ses manufactures, la France serait incomparablement plus riche et plus florissante qu’elle ne l’est aujourd’hui ? Si des praticiens éclairés combattent une pareille thèse, nombre d’esprits réputés instruits et judicieux la prennent pour de l’argent comptant ; et de fait, en France, à l’heure qu’il est, on paraît assez généralement soupirer après les bénédictions d’un libre commerce avec l’Angleterre. Il serait difficile de contester, et nous entrerons ailleurs dans quelques développements sur ce point, qu’une plus grande activité des échanges tournerait, à beaucoup d’égards, au profit des deux peuples. Il est visible, toutefois, que l’Angleterre aspire à échanger, non--

    treints à accorder aux esclaves une certaine part de propriété dans le sol qu’ils cultivent, et un certain degré de liberté personnelle ; en un mot d’établir un servage adouci avec la perspective de l’émancipation, et de préparer ainsi le nègre à la plénitude de la liberté ? Les noirs étaient-ils donc moins esclaves sous leurs despotes en Afrique que dans les plantations américaines ? La transition de la liberté de la nature à celle de la civilisation était-elle possible, sans qu’une population barbare fût disciplinée par une rigoureuse obéissance ? Est-ce que, par des actes du Parlement, on a pu subitement transformer les noirs des Indes occidentales en travailleurs libres ? Le genre humain tout entier n’a-t-il pas été façonné de la sorte au travail et à la liberté ? Assurément les Anglais ne sont pas assez étrangers à l’histoire de la civilisation pour n’avoir pas, depuis longtemps, en eux-mêmes, répondu d’une manière satisfaisante à cette question. Il est évident que ce qu’ils ont fait, et ce qu’ils font encore pour l’abolition de l’esclavage des noirs, a de tout autres motifs que ceux de la pure philanthropie, ainsi que nous l’expliquerons ailleurs.