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guerre des gaules. — liv. v.

biorix avant qu’il pût se mettre sur ses gardes, et que la renommée ou des courriers ne lui eussent rien fait savoir de la marche de Basilus ; ce fut aussi un grand bonheur pour Ambiorix d’avoir pu s’échapper, après avoir perdu tout son équipage, ses armes, ses chariots, ses chevaux. Ce qui le sauva, c’est que sa maison étant située dans les bois, comme le sont presque toutes celles des Gaulois, qui, pour se garantir des ardeurs du soleil, les bâtissent près des forêts et des rivières. Ses compagnons arrêtèrent quelque temps les nôtres dans un défilé. Un des siens profita de ce moment pour Je faire monter à cheval ; ensuite les bois couvrirent sa fuite. Ainsi la fortune fut pour beaucoup et dans le péril qu’il courut alors, et dans la manière dont il s’en tira.

31. Ambiorix ne rassembla point ses troupes : est-ce parce qu’il ne jugeait pas à propos de combattre, ou parce qu’il n’en eut pas le temps, à cause de l’arrivée soudaine de notre cavalerie, qu’il croyait suivie de tout le reste de l’armée ? c’est ce qu’on ne sait point. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’après sa fuite, il envoya secrètement avertir ceux de la campagne de prendre garde à eux. Les uns se sauvèrent dans les Ardennes, d’autres dans les marais ; les plus voisins de l’Océan se cachèrent dans ces îles que forment les marées. Plusieurs, abandonnant le pays, se réfugièrent avec tous leurs biens auprès des personnes avec lesquelles ils avaient le moins de liaison. Cativulcus, roi de la moitié du pays de Liège, qui s’était uni aux projets d’Ambiorix se sentant accablé de vieillesse, et hors d’état de supporter les fatigues de la guerre ou de la fuite, après avoir maudit mille fois Ambiorix qui l’avait embarqué dans cette entreprise, s’empoisonna avec de l’if, arbre très-commun en Gaule et en Allemagne.

32. Les peuples de Condroz et du Limbourg, Allemands d’origine et réputés comme tels, lesquels sont établis entre le canton de Liège et celui de Trêves, députèrent aussitôt vers César pour le prier de ne pas les mettre au nombre de ses ennemis, et de ne point regarder comme rebelles tous les Allemands d’en-deçà du Rhin, lui représentant qu’ils n’avaient ni pensé à la guerre, ni à secourir Ambiorix. César s’en étant informé près des captifs, et ayant appris qu’ils ne lui en avaient point imposé, leur promit de n’exercer aucun ravage dans leur pays, à condition qu’ils lui remettraient les Liégeois qui s’étaient réfugiés chez eux. Ensuite il partagea ses troupes en trois corps, et fit transporter le bagage de toutes ses légions dans le château de Tongres, situé presque dans le cœur du pays de Liége, où Titurlus et Aurunculeius avaient eu leur quartier d’hiver. Ce lieu parut d’autant plus convenable à César, que les fortifications qu’on y avait faites l’année précédente, étaient encore en état, ce qui épargna bien du travail aux troupes. Il y laissa pour garder les bagages la quatorzième légion, une des trois qui avaient été levées depuis peu en Italie ; confia cette légion et la garde du camp à Q. Tullius Cicéron, et y joignit deux cents cavaliers.

33. En même temps, il envoya T. Labiénus avec trois autres légions vers l’Océan, dans le pays voisin de la Gueldre et du Brabant ; et Trébonius eut ordre de marcher avec un pareil nombre vers la province voisine de Namur, et de la ravager. Pour lui, avec les trois légions qui restaient, il prit le chemin de l’Escaut qui se jette dans