Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 3, 1840.djvu/50

Cette page n’a pas encore été corrigée
50
César.

quoique dans un climat très-froid, à ne se vêtir que de peaux, qui, n’étant pas assez larges, laissent la plus grande partie de leur corps toute nue ; et d’ailleurs ils ne se baignent que dans les fleuves.

2. Ils reçoivent chez eux les marchands ; mais c’est plutôt pour leur vendre le butin qu’ils ont fait à la guerre, que pour acheter de leurs marchandises. Ils ne sont pas même curieux de ces beaux chevaux étrangers dont les Gaulois font tant de cas, et qu’ils achètent si cher ; mais ils préfèrent ceux du pays, tout mauvais et tout difformes qu’ils sont, et par un continuel exercice ils les rendent infatigables. Comme dans les combats, ils sautent souvent à bas de leurs chevaux, pour combattre à pied, ils les accoutument à demeurer dans la même place, et, quand il en est besoin, ils remontent dessus avec une vitesse surprenante. C’est aussi chez eux une marque de la mollesse la plus honteuse que de se servir de selle ; aussi ne balancent-ils point, quelque peu nombreux qu’ils soient, d’attaquer une grosse troupe de cavalerie bien équipée. Ils ne se permettent point du tout l’usage du vin ; ils croient que cette tiqueur amollit les hommes, qu’elle les rend efféminés et incapables de supporter la fatigue.

3. Ils se font gloire de n’être bornés que par de vastes déserts c’est, selon eux, une preuve qu’un grand nombre de nations ne pouvant leur résister, ont abandonné ces pays. Aussi prétend-on que du côté des Suèves, il y a sur leur frontière près de-deux cents lieues de pays inhabité. De l’autre côté, ils sont voisins de ceux de Cologne, peuples autrefois très-puissans autant que les Allemands peuvent l’être, et qui sont d’un naturel un peu moins féroce, parce qu’étant placés sur les bords du Rhin, ils ont plus de commerce, et que le voisinage des Gaulois a su les accoutumer à leurs mœurs et à leurs manières. Quelques guerres que les Suèves leur eussent faites, ils étaient en si grand nombre et si puisses qu’ils n’avaient pu les chasser ; il les avaient pourtant fort abaissés et fort affaiblis, et les avaient enfin rendus tributaires.

4. Ceux de Bergue et de Zutphen, dont nous avons parlé plus haut, se trouvèrent dans le même cas ; ils soutinrent plusieurs années les attaques des Suèves : à la fin chassés de leur pays après avoir, durant trois ans, erré dans différens endroits de l’Allemagne, ils arrivèrent sur le Rhin. Les peuples de la Gueldre et du Brabant habitaient alors ces pays, et demeurant sur tes bords du fleuve, ils cultivaient les terres des environs. Mais effrayes à l’arrivée de tant de gens, ils abandonnèrent ce qu’ils possédaient au delà du fleuve et s’étant fortifiés en-deçà, ils empéchèrent les Allemands de passer. Ceux-ci, après avoir tout mis en œuvre, voyant qu’ils ne pouvaient ni Les forcer faute de vaisseaux, ni passer secrètement, parce que les autres étaient sur leurs gardes, feignirent de retourner chez eux, ils marchèrent, en effet, pendant trois jours, puis revenant de suite sur leurs pas, et leur cavalerie, ayant fait en une nuit le chemin de ces trois journées ils tombèrent sur ceux du Brabant et de la Gueldre, au moment qu’ils y pensaient le moins, et qu’informes de leur départ d’après leurs espions, ils étaient retournés sans crainte dans leurs bourgs de là du Rhin. Après les avoir taillés en pièces, ils prirent leurs vaisseaux et passèrent ce fleuve, avant que ceux de cette nation qui habitaient de ce côté-là en eussent eu aucun avis : ils s’emparèrent de leurs demeures et se nourri-