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guerre des Gaules. — liv. iii.

et leur pays étant d’ailleurs plein de forêts et de marais, ils s’y retirèrent avec tout ce qu’ils avaient. César, parvenu à l’entrée de ces forêts, commença d’abord à s’y retrancher, sans que l’ennemi parût ; mais lorsque les nôtres se furent dispersés pour travailler aux retranchemens, les Barbares vinrent de tous côtés fondre subitement sur eux. Les Romains, ayant promptement pris les armes, les repoussèrent, et en tuèrent plusieurs ; mais s’étant engagés trop avant dans ces lieux couverts, ils perdirent quelques soldats.

29. Les jours suivans, César travaille à faire abattre la forêt, et pour empêcher que ses troupes ne puissent être prises en flanc, lorsqu’elles seraient sans armes, ou qu’elles ne s’y attendraient pas, tout ce que l’on coupait, il le fait jeter de côté et d’autre vers l’ennemi, et se couvre par ce moyen des deux côtés. La diligence avec laquelle ce travail s’exécutait, le fit extrêmement avancer en peu de jours : nous étions même déjà maîtres de leurs troupeaux et des bagages qui étaient aux derniers rangs, et ils s’enfonçaient toujours de plus en plus dans les bois, lorsqu’il survint de si grandes et de si longues pluies, qu’il fallut nécessairement discontinuer le travail, et songer à se mettre à couvert, nos gens ne pouvant plus demeurer sous des tentes. Après donc avoir ravagé tout le pays, et brûlé tours bourgades, César ramena son armée, qu’il mit en quartier d’hiver sur tes terres de ceux du Mans et de Lisieux, et chez les autres peuples soulevés précédemment.



LIVRE QUATRIÈME.
Défaite des peuples de Bergue et de Zutphen, suivie d’une description des mœurs des Suèves. — Passage du Rhin. — Expédition d’Angleterre.
An avant J. C. 55, de Rome 599.

1. L’hiver suivant, sous le consulat de C. Pompée et de M. Crassus, ceux de Bergue et de Zutphen, peuples de l’Allemagne, passèrent le Rhin en grand nombre assez près de son embouchure, parce que, depuis plusieurs années, les Suèves leur faisaient la guerre, et les empêchaient de cultiver leurs terres. Ces Suèves sont la nation la plus puissante et la plus guerrière de toute l’Allemagne. Ils passent pour avoir cent bourgs, lesquels tous les ans fournissent chacun mille soldats, qui vont porter la guerre chez les peuples voisins : le reste demeure dans le pays et le cultive, tant pour eux que pour ceux qui vont en campagne. L’année suivante, les premiers vont à leur tour porter les armes, et les derniers restent dans le pays. Par ce moyen, l’amour de l’agriculture et l’ardeur pour la guerre s’entretiennent également dans cette nation. Du reste, les terres sont chez eux en commun, sans que personne en ait en propre ; ils ne demeurent même jamais plus d’un an dans le même lieu. Ils font peu de provisions de blé, car ils vivent presque uniquement de lait, de la chair de leurs troupeaux et surtout de leur chasse. Ce genre de vie, joint à ce qu’ils sont toujours en action, et à la liberté dont ils jouissent (en effet ils élèvent leurs enfants dans la même indépendance, dans le même éloignement de tout art, et ne leur font rien faire contre leur gré), les rend robustes et d’une taille prodigieuse. Ils se sont habitués