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guerre des Gaules. — liv. iii.

nommé Martigny, situé au fond d’un vallon, joint à une petite plaine environnée de hautes montagnes. Comme ce bourg était partagé en deux par une rivière, il en abandonna un côté aux Gaulois, prit l’autre pour y faire hiverner ses cohortes, et le fit fortifier d’un fossé et d’un retranchement.

2. Après y avoir passé plusieurs jours et fait venir des vivres, ses coureurs vinrent tout-à-coup l’avertir que ces Gaulois auxquels il avait laissé l’autre partie du bourg s’étaient retirés la nuit, et que les montagnes voisines se trouvaient occupées par ceux du haut Valais. Plusieurs raisons leur avaient fait prendre la résolution de recommencer sur-le-champ la guerre, et d’accabler notre légion. Premièrement, ils savaient qu’elle n’était pas complète, parce qu’on en avait détaché deux cohortes et plusieurs soldats pour escorter les convois ; et c’est pour cela qu’ils la méprisaient. D’ailleurs, ils se flattaient d’avoir un grand avantage sur elle, parce qu’elle était campée dans un fond, et qu’en l’attaquant du haut des montagnes, elle ne pourrait soutenir leur effort. Enfin, ils ne pouvaient supporter l’idée de leurs enfans enlevés sous le nom d’otages, et ils se persuadaient que les Romains cherchaient à s’emparer de leurs montagnes non-seulement pour avoir un passage, mais encore pour s’y établir et les joindre à leur province qui en est voisine.

3. Sur ces nouvelles, Galba, qui n’avait pas encore achevé ses retranchemens, ni ramassé le blé et les autres provisions, parce qu’ayant fait la paix et reçu des otages, il croyait n’avoir rien à craindre, assembla promptement le conseil, où quelques-uns voyant, contre leur attente, le péril si proche, et toutes les hauteurs couvertes de Barbares, en sorte que ni secours ni convois ne pouvaient leur venir, parce que les passages étaient fermés, et désespérant presque déjà de pouvoir se sauver, furent d’avis d’abandonner le bagage, et de se retirer en suivant le même chemin par lequel ils étaient venus. Mais l’avis le plus général fut de réserver ce parti pour la dernière extrémité, de tenter le sort des armes et de défendre les retranchemens.

4. À peine cette résolution eut-elle été prise, et se fut-on mis en devoir de l’exécuter, que les Barbares vinrent fondre de tous côtés sur notre camp à coups de pierres et de dards. Les Romains se défendirent courageusement ; et comme ils lançaient leurs traits d’en haut, tous portaient coup : s’il y avait quelque endroit faible, ils y envoyaient aussitôt du secours ; mais l’ennemi relevait sans cesse par des troupes fraîches celles qui étaient fatiguées du combat, ce que notre petit nombre ne nous permettait pas de faire : nous n’étions pas même en état de remplacer un soldat qui aurait été blessé, ou qui se serait retiré, excédé de lassitude de la longueur du combat.

5. Enfin, l’action ayant duré plus de six heures, et les forces aussi bien que les traits des Romains commençant à s’épuiser, tandis qu’au contraire loin de se relâcher, l’ennemi profitait de leur faiblesse pour combler le fossé et forcer le retranchement, les choses étaient réduites à la dernière extrémité. Alors le primipile P. Sextius Baculus, que nous avons vu percé de coups à la bataille contre ceux du Hainaut, et C. Volusénus, tribun militaire, homme de conseil et d’action, vinrent en hâte trouver Galba, et lui représentèrent que le seul moyen de salut qui restât, était de tenter une sortie. Ayant assemblé les officiers, il fait promptement donner ordre aux