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végèce, liv. iv.

dans la place tous les vivres des environs, afin que l’abondance soutienne les assiégés, et que la disette chasse les assiégeans. Faites saler la chair des porcs et de tous les animaux que vous ne pourrez nourrir plus long-temps ; elle servira de supplément au blé, dont les rations pourront être alors moins fortes. La volaille pouvant se nourrir sans dépense sera très utile pour les malades.

Il faut aussi serrer dans la place les fourrages nécessaires pour la cavalerie, et brûler ceux qu’on ne pourrait y conduire. Faites-y voiturer tout le vin, le vinaigre et les fruits des environs, afin que l’assiégeant ne trouve aucune ressource pour sa subsistance.

Ce serait réunir l’agréable à l’utile que de faire venir des légumes dans les jardins et même dans les cours ; mais cet amas considérable de toutes sortes de vivres deviendrait inutile, si vous ne commettiez, dès le commencement du siége, à des officiers de confiance, le soin de les distribuer avec économie. Une ville où l’on observe la sobriété au milieu de l’abondance ne ressent jamais la famine. On la prévient encore en faisant sortir les vieillards, les enfans et les femmes, lorsque le peu de vivres qu’il y a dans la place fait craindre qu’ils ne viennent à manquer pour ceux-mêmes qui la défendent.


CHAPITRE VIII.

De la défense des murs.

L’assiégé doit avoir tout prêts pour sa défense, du bitume, du soufre, de la poix fondue, de l’huile bouillante, en un mot, tout ce qui peut incendier les machines de l’assiégeant. Il faut qu’il établisse des magasins de fer. et de charbon, pour pouvoir forger des armes de plusieurs trempes ; qu’il fasse des provisions de bois propre à monter les armes de trait et de jet, et qu’il place dans les tours et sur les murs, des monceaux de cailloux qu’on aura ramassés sur le bord des rivières ; leur figure arrondie les rend plus commodes à lancer, et leur pesanteur plus meurtriers. On lance les plus petits avec la main seule ou avec différentes frondes, les plus gros avec des catapultes ; de sorte que ces derniers fort pesans par eux-mêmes, recevant de la machine une forte impulsion, non seulement renversent et blessent l’assiégeant, mais brisent même ses machines.

On construit aussi de grandes roues d’un bois très-vert, afin qu’elles soient plus pesantes ; ou, plus simplement, on scie d’épais cylindres qu’on prend dans de très-gros arbres en forme de billes, et qu’on polit afin qu’ils roulent plus facilement. On jette du haut des murs ces roues et ces cylindres. qui, par un choc violent, renversent l’infanterie et effraient les chevaux. Il faut aussi avoir sous la main des poutres, des madriers et des chevilles de fer pour l’assemblage, afin d’être en état d’opposer plus promptement machines à machines.

Cette promptitude de construction est surtout essentielle lorsqu’on est obligé d’augmenter la hauteur ordinaire des tours et des murs contre un ennemi qui cherche à les surmonter par ces tours portatives, dont l’élévation facilite la prise des villes.


CHAPITRE IX.

Des cordes propres aux machines et ce qui y supplée.

En vain aurait-on toutes les machines imaginables, si l’on manquait de

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