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végèce, liv. iii.

nir, choisissez bien-les troupes que vous y mènerez une seconde fois et celles que vous destinez à les soutenir ; saisissez surtout les occasions de dresser des embûches au vainqueur pour pouvoir tomber sur lui avec avantage, rien ne ranime tant les vaincus, et ces occasions ne vous manqueront pas, car le propre des bons succès est de rendre l’homme peu précautionné et présomptueux. En un mot, si quelqu’un s’imaginait qu’une déroute est un malheur sans ressource, qu’il fasse attention que l’événement des batailles s’est trouvé très-souvent en faveur des généraux qui les avaient commencées très-malheureusement.


CHAPITRE XXV.

Maximes générales de la guerre.

Dans quelque guerre que ce soit, une expédition ne peut être avantageuse à l’un des partis qu’elle ne soit désavantageuse ou préjudiciable à l’autre. Prenez donc garde de vous laisser attirer à quelque espèce de guerre favorable au parti contraire ; que votre utilité seule soit la règle de vos démarches. Faire les manœuvres auxquelles l’ennemi voudrait vous engager, ce serait travailler de concert avec lui contre vous-même.

Plus vous aurez exercé et discipliné le soldat dans les quartiers, moins vous éprouverez de mauvais succès à la guerre.

N’exposez jamais vos troupes en bataille rangée, que vous n’ayez tenté leur valeur par des escarmouches.

Tâchez de réduire l’ennemi par la disette, par la terreur de vos armes, par les surprises plutôt que par les combats, parce que c’est la fortune qui en décide le plus souvent.

Il n’y a point de meilleurs projets que ceux dont on dérobe la connaissance à l’ennemi jusqu’au moment de l’exécution.

Savoir saisir les occasions est un art encore plus utile à la guerre que la valeur.

Détachez le plus d’ennemis que vous pourrez de leur parti ; recevez bien ceux qui viendront à vous, car vous gagnerez plus à débaucher des soldats à l’ennemi qu’à les tuer.

Fortifiez vos postes après une bataille plutôt que de disperser votre armée.

Celui qui juge sainement de ses forces et de celles de l’ennemi est rarement battu.

La valeur l’emporte sur le nombre ; mais une position avantageuse l’emporte souvent sur la valeur.

La nature produit peu d’hommes courageux par eux-mêmes, l’art en forme un plus grand nombre.

La même armée qui acquiert des forces dans l’exercice les perd dans l’inaction.

Ne menez jamais à une bataille rangée des soldats, qu’ils ne vous paraissent espérer la victoire.

Des manœuvres toujours nouvelles rendent un général redoutable à l’ennemi ; une conduite trop uniforme le fait mépriser.

Qui laisse disperser ses troupes à la poursuite des fuyards cherche à perdre la victoire qu’il avait gagnée.

Négliger le soin des subsistances, c’est s’exposer à être vaincu sans combattre.

Si vous l’emportez sur l’ennemi par le nombre et la valeur, vous pouvez disposer votre armée en carré long ; c’est le premier ordre de bataille.

Si au contraire vous êtes le plus fai-