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végèce, liv. iii.

retirer en sûreté : si l’ennemi entreprenait de l’y attaquer, ce détachement tombait sur lui des hauteurs. Rien n’est plus dangereux pour la troupe qui en poursuit une sans précaution, que d’en rencontrer une autre en embuscade, ou préparée à la recevoir : cette circonstance est même très-favorable pour tendre des embûches à l’ennemi qui vous poursuit ; car la supériorité qu’il se sentira sur tes fuyards le rendra vraisemblablement trop peu précautionné. On sait que la trop grande sécurité est toujours dangereuse. Saisissez le temps d’un repas, d’un fourrage, d’une marche fatigante, pour tomber sur l’ennemi qui ne s’y attend pas : en un mot, tâchez de surprendre, et de n’être jamais surpris. Une troupe surprise succombe honteusement sous une autre moins nombreuse et moins brave en effet, quoique l’intelligence influe considérablement sur le succès d’une bataille, le vaincu peut, à la rigueur, imputer sa défaite à la fortune ; au lieu qu’il n’a point d’excuses, lorsqu’il est la dupe des ruses ; parce qu’il peut les prévenir en envoyant des gens capables à la découverte.

Voici une ruse assez usitée contre des ennemis qui se retirent. On détache après eux, par le même chemin qu’ils ont pris, une petite troupe de cavalerie, avec la précaution d’en faire avancer une autre plus considérable à la même hauteur, et par une route détournée : dès que le petit détachement a atteint les ennemis, il escarmouche et se retire ; alors, pour peu que l’ennemi se tranquillise ou se néglige, le gros détachement qui cache sa marche tombe avec avantage sur une troupe qui se croyait à l’abri de toute insulte.

Un général, projetant de se retirer à travers des bois, en envoie communément occuper les hauteurs et les défilés, afin de n’y être exposé à aucune embuscade ; quelquefois il laisse derrière lui des abatis qui embarrassent la marche de l’ennemi, et arrêtent sa poursuite.

Au reste, la retraite fournit aux deux partis des occasions de ruses. Celui qui se retire peut, en feignant de marcher avec toute son armée, en laisser une partie en embuscade à la tête des défilés, ou sur des hauteurs couvertes de bois ; et, sitôt que les ennemis s’y sont engagés les attaquer avec son arrière garde et ses troupes embusquées.

Celui qui poursuit peut détacher à l’avance une troupe choisie qui, par des chemins détournés, revienne prendre en front l’ennemi, que lui-même prend en queue. Dans une retraite, vous pouvez revenir sur vos pas à la faveur de la nuit, et tailler en pièces des gens endormis. Dans la poursuite, vous pouvez atteindre les ennemis, et les surprendre par quelque marche prompte et secrète : s’ils passent une rivière pour vous poursuivre, attaquez les dans l’instant que la moitié de leur armée, ayant passé, se trouve séparée de l’autre par la rivière ; si, au contraire. Us en ont tenté le passage pour vous éviter, serrez votre marche, et tombez sur ceux qui n’ont pas encore eu le temps de passer.


CHAPITRE XXII.

Des chameaux, et de la cavalerie armée de toutes pièces.

Quelques nations se sont servies autrefois de chameaux dans les combats ; par exemple, les Ursiliens en Afrique ; les Macètes s’en servent encore. On