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par l’expérience, vouaient désarmées plus disciplinées que nombreuses. Une légion composée de dix mille fantassins et de deux mille chevaux, compris les auxiliaires, suffirait pour les guerres peu importantes et on en donnait souvent le commandement à un préteur, comme à un général du second ordre. S’il était question de ramener sous le joug quelque nation révoltée et très-brave, on mettait en campagne deux armées et à leur tête deux généraux avec cette formule : Que chacun des chefs en particulier, ou tous deux ensemble, prennent garde que la république ne reçoive aucun dommage.

Enfin, quoique les Romains eussent dans la suite à combattre presque tous les ans en différens pays, contre différentes nations, ils n’envoyaient que de petites armées, qu’ils préféraient, comme nous avons dit, à de plus grandes moins disciplinées ; mais quelles qu’elles fussent, ils observaient exactement que le nombre des auxiliaires ou des alliés n’excédât pas celui des nationaux.


CHAPITRE II.
Des moyens de conserver la santé dans les armées.

En vain on aura de bonnes armées, si on ne sait pas y maintenir la santé. Les moyens qu’on peut proposer, comprennent les lieux, les eaux, les saisons, les remèdes et les exercices. Quant aux lieux la précaution qu’on doit prendre, c’est de ne pas tenir tes troupes dans des montagnes, ou des collines sèches, sans arbres et sans couvert ; par rapport aux saisons, de ne pas les faire partir trop tard le matin dans l’été, de peur que le poids de la chaleur, joint à la fatigue du chemin, ne leur causent des maladies. Il faut plutôt les mettre en marche à la pointe du jour, afin d’arriver de bonne heure à l’endroit marqué ; et surtout ne pas les faire camper sans tentes dans un hiver rigoureux. On ne doit point. les faire marcher de nuit par les neiges et par les glaces, ni les laisser manquer de bois ni d’habits. Des soldats transis de froid ne sont propres à aucune expédition. Qu’on ne leur laisse point boire d’eau corrompue ou bourbeuse, espèce de poison capable d’engendrer des maladies contagieuses. Si quelques-uns en sont attaqués, il faut avoir recours aux alimens propres à les rétablir, et à l’art des médecins ; c’est à quoi tous tes officiers, depuis le premier jusqu’au dernier, doivent avoir une attention particulière ; car on fait mal la guerre avec des soldats qui, outre les fatigues inséparables de leur état, ont encore à supporter celles de la maladie. Les maîtres de l’art ont toujours cru l’exercice journalier des armes plus propre que les remèdes à entretenir la santé dans les armées ; c’est sur ce principe qu’ils l’ordonnaient à l’infanterie, soit en plein air, dans les beaux jours, soit à couvert dans les temps de pluie ou de neige. Ils exerçaient aussi la cavalerie, non-seulement en plaine, mais sur des terrains escarpés ou pleins de crevasses, dans des sentiers serrés et embarrassés, afin que dans le combat, aucune de ces difficultés n’arrêtât une cavalerie qui se les était rendues familières. Enfin, il faut observer que, si on laisse trop tong-temps une grande s armée dans les mêmes lieux, pendant l’été, ou pendant l’automne, la malpropreté, la corruption des eaux, l’infection de l’air, y répandent des maladies capables de la détruire ; et qu’on ne les peut éviter qu’en changeant souvent de camp.