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vre ces brigands dans leur fuite. Didius est tué avec plusieurs des siens, après avoir fait des prodiges de valeur. Quelques-uns se sauvent dans des chaloupes qu’ils trouvent sur le rivage ; d’autres atteignent en nageant les, galères qui étaient à l’ancre, et, coupant les câbles, gagnent la haute mer à force de rames ; ce qui fut la cause de leur salut. Les Portugais s’emparent du butin. De Cadix César retourne à Séville.

41. Cependant Fabius Maximus, qu’il avait laissé comme chef au camp de Munda, poussait les travaux du siége ; de sorte que, se voyant enfermés de toutes parts, les ennemis résolurent de se battre entre eux. Le carnage fut grand ; ensuite ils font une sortie. Nous profitâmes de cette occasion pour nous rendre maîtres de la ville, où nous fîmes le reste prisonniers ; et de là nous marchâmes sur Ossone, place non moins forte par sa position que par l’art, et dont la grandeur et les travaux multipliés semblaient devoir détourner un ennemi quelconque d’y mettre le siége. D’ailleurs il n’y avait de l’eau que dans la ville ; et à huit milles aux environs il eût été impossible de trouver le moindre ruisseau : ce qui était d’un grand secours pour les habitans. Ajoutez que pour avoir du gazon propre à former des retranchemens, et du bois nécessaire pour élever des tours, il fallait l’aller chercher à deux lieues de là : car Pompée, ayant coupé tous les bois environnans, les avait fait porter dans la place pour en rendre l’attaque plus difficile. Ainsi les nôtres étaient nécessairement contraints d’en tirer de Munda, qu’ils venaient de prendre.

42. Tandis que ces événemens se passent à Munda et à Ossone, César, qui de Cadix était retourné dans Séville, y tint le jour suivant une grande assemblée ; là il rappelle, qu’au commencement de sa questure, il avait particulièrement affectionné cette province ; qu’après lui avoir témoigné la plus tendre bienveillance, il l’avait comblée de tous les priviléges imaginables ; qu’ensuite, pendant sa préture, il avait obtenu du sénat en sa faveur la remise des impôts dont s’était plu de la charger Métellus, et qu’il avait affranchie de cette opposition ; qu’en même temps, s’étant déclaré son protecteur, il avait procuré plusieurs fois à ses députés l’honneur d’être admis au sénat, et qu’il s’était attiré une foule d’ennemis, en défendant leurs intérêts privés et publics ; qu’enfin, pendant son consulat, et bien qu’abusent, il avait rendu à la province tous les services possibles ; que cependant, au lieu de payer de reconnaissance tant de bienfaits, ils s’étaient toujours montrés ingrats, et envers lui et envers le peuple romain, non-seulement dans cette guerre, mais dans toutes les précédentes ; c’est ainsi qu’il les avait éprouvés. « Quoique vous connussiez bien, ajouta t-il, le droit des gens, et celui des citoyens romains, vous les avez violés comme des Barbares, en portant mille fois vos mains profanes sur la personne sacrée des magistrats de Rome ; en plein jour, vous avez voulu assassiner Cassius au milieu de la place publique ; vous avez été si mortels ennemis de la paix, que la république était toujours obligée d’entretenir chez vous des légions ; les bienfaits sont à vos yeux des injures, les injures des bienfaits ; et jamais vous n’avez pu montrer ni union dans la paix, ni valeur dans la guerre ; le jeune Pompée a trouvé chez vous un asile dans sa fuite ; vous avez souffert que, simple particulier, il usurpât les faisceaux et le souverain pouvoir.