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les cadavres des ennemis tinrent lieu de gazon : la palissade fut composée de leurs javelots et de leurs dards, où paraissaient suspendus leurs boucliers ; au-dessus s’élevaient leurs épées et leurs lances ; les têtes de leurs morts comme rangées en ordre étaient tournées toutes vers la place. Ce fut de ces marques redoutables de notre bravoure, preuves éclatantes et bien propres à inspirer la terreur, que l’on environna la ville et les ennemis. Ainsi les Gaulois procèdent à l’attaque d’une place forte, après des l’avoir comme investie des cadavres de leurs adversaires qu’ils entremêlent de piques et de traits. Après cette défaite, le jeune Valérius, fuyant à Cordoue avec quelque cavalerie, informa de l’événement Sext. Pompée qui était dans sa ville. Sur cette nouvelle, celui-ci, distribuant entre ses cavaliers tout l’ardu gent qu’il pouvait avoir, sort de la place vers neuf heures de l’après-midi, après avoir fait entendre aux habitans qu’il allait trouver César pour traiter de la paix. Quant à Cnéius, suivi d’une poignée de cavaliers et de fantassins, il prit, pour aller joindre sa flotte, le chemin de Tariffe, ville distante de Cordoue d’environ cinquante-sept lieues ; et lorsqu’il n’en fut plus qu’à trois, te P. Calvitius, son ancien lieutenant, écrivit en son nom qu’on lui envoyât une litière pour le porter dans la ville, parce qu’il était malade. Sur la réception de cette lettre, Pompée fut transporté à Tariffe. Ses partisans vinrent aussitôt (on pense que ce fut en secret) le trouver dans la maison où il était descendu afin de prendre ses ordres relativement à la guerre ; et les voyant réunis en grand nombre auprès de sa personne, sans sortir de litière, il se met sous leur protection.

33. Après la victoire de Munda, César, avant formé le blocus de cette ville, se rendit à Cordoue ; ceux qui étaient échappés de la défaite s’y emparèrent du pont. Quand nous y fûmes arrivés ils commencèrent leurs bravades, nous criant que nous n’étions qu’une poignée de fuyards, et nous demandant où nous voulions nous réfugier. En même temps, ils nous attaquèrent au passage du pont. César traverse le fleuve et campe devant la ville. Là, s’était retiré après la bataille Scapula, le principal auteur du soulèvement des ainanchis et des esclaves ; s’y voyant assiégé, il les assembla tous, se fit élever un bûcher, et dresser une table magnifique ; ayant soin que la salle du festin fût décorée des plus riches tapis de pourpre ; puis, après avoir distribué sa vaisselle et son argent à ses domestiques, il soupa de bonne heure, but du vin mêlé de nard et de résine : ensuite, sur la fin du repas, il se fit tuer par un de ses esclaves, tandis qu’un affranchi, qui servait à ses débauches allumait le bûcher suivant son ordre.

34. À peine César eut-il pris ses positions devant la ville, que la discorde en vint à un tel point entre les habitans, dont les uns tenaient pour nous, les autres pour Pompée, qu’on les entendait presque de notre camp. Durant ces troubles, vinrent se rendre à César quelques légions qui se trouvaient dans la place, et composées pour la plupart de fugitifs, et des esclaves des habitans de la ville, qu’avait affranchis Sext. Pompée. Mais la treizième légion se mit en devoir de défendre Cordoue, et, malgré les partisans de César, elle s’empara des murailles et d’une partie des tours. Ceux-ci députent une seconde fois vers César, pour le prier de faire entrer ses légions à leur secours. Ceux qui s’étaient sauvés de la bataille, , voyant cette résolution, mirent le feu à te la ville : les nôtres y pénètrent, char-