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hirtius.


tel je me montrerai envers les citoyens qui se rendront à moi ! » Ainsi répliqua César.

18. Lorsque les députés congédiés par lui furent à la porte de la ville, Tib. Tullius ne suivit pas Antoine qui entrait ; mais retournant à la porte, il se saisit d’un homme. À cette vue, Antoine tira de son sein un poignard dont il lui perça la main. Ensuite ils se réfugièrent tous deux auprès de César. À la même époque, un enseigne de la première légion vint se rendre, et nous apprit que le jour de l’escarmouche, sa compagnie avait perdu trente-cinq hommes, mais que dans le camp de Pompée, il était défendu de le dire, ni même d’avouer qu’on eût fait la moindre perte. Un citoyen qui, s’étant retiré au camp de César, avait laissé sa femme et son fils dans la ville, fut égorgé par son esclave qui s’enfuit secrètement vers Pompée, d’où il nous envoya un boulet, portant une inscription par laquelle il nous donnait avis des préparatifs que l’on faisait dans la place pour la défendre. Après avoir reçu ces lettres, ceux qui avaient coutume de lancer le boulet avec une inscription étant rentrés dans la ville, deux frères portugais vinrent se rendre à nous au bout de quelque temps, et nous apprirent que Pompée, dans une harangue qu’il avait adressée à ses troupes réunies, avait déclaré que, puisqu’il ne pouvait venir au secours de la place, il fallait que les assiégés l’évacuassent pendant la nuit, et prissent le chemin de la mer : qu’un des assistans ayant dit qu’il valait mieux marcher au combat que de paraître vouloir prendre la fuite on l’avait aussitôt massacre. Dans ce même temps, on arrêta deux courriers que Pompée envoyait aux assiégés ; César leur fit tenir les lettres dont ils étaient chargés pont eux, et comme un des deux messagers lui demandait la vie, il lui proposa d’aller mettre le feu à une tour de bois des habitans, avec promesse de tout lui accorder en cas de succès. Il était difficile d’y parvenir impunément ; aussi à peine celui qui tentait l’entreprise en approcha-t-il qu’il fut tué. La même nuit, un déserteur vint nous apprendre que Pompée et Labiénus avaient témoigné leur indignation du massacre des assiégés.

19. Vers neuf heures du soir, une de nos tours de bois fut fendue depuis le pied jusqu’au second et au troisième étage par le grand nombre de traits que les ennemis décochèrent contre elle, En même temps, on se battit sous les murailles avec la plus grande ardeur ; et les assiégés, profitant d’un vent favorable, brûlèrent une autre de nos tours. Le lendemain une mère de famille se précipita du haut des murs, et, s’étant rendue à notre camp, nous dit qu’elle avait formé le dessein de passer du côté de César avec sa maison entière ; mais que toute sa suite avait été arrêtée et égorgée. Au même instant on nous jeta du haut des murailles des tablettes, portant ces mots par écrit « L. Minucius César. Puisque Cn. Pompée m’abandonne, si tu veux m’accorder la vie, je te promets de te servir avec le même courage et le même dévouement que j’ai montrés pour sa cause. » Les assiégés renvoyèrent en même temps à César les députés qui étaient venus le trouver la première fois, pour lui dire que s’il voulait leur laisser l’existence, ils livreraient la place le lendemain. Il leur répondit qu’il était César, et qu’il tiendrait sa parole. Ainsi, avant le 19 de février on lui rendit la ville, et il fut proclamé imperator.

20. Pompée eut à peine appris par quelques fuyards cette reddition, que, décampant, il marcha vers Lucubi : s’y