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guerre d’espagne.


puis quelques mois, était occupé au siége de Monte-Maior. Instruits de l’approche de César, les assiégés lui envoyèrent des ambassadeurs qui, ayant passé secrètement au travers du camp de Pompée, vinrent le prier de les secourir le plus promptement possible. César, qui savait que de tout temps en cette ville avait eu un attachement extrême pour tes Romains, fit partir vers les neuf heures du soir, six cohortes avec un nombre égal de cavaliers, sous les ordres de L. Julius Paciécus, brave officier, et bien connu dans la province. À peine ces troupes furent-elles au camp de Pompée, qu’il survint un si terrible orage, accompagné d’un vent si fort, qu’on ne se voyait pas, et qu’à peine pouvait-on reconnaître son voisin ; ce qui fut très-favorable pour cette entreprise : car Paciécus, étant arrivé là, fit marcher ses cavaliers deux à deux droit vers la ville au travers du camp des assiégeans ; et une sentinelle leur ayant demandé qui ils étaient, un des nôtres lui dit de garder le silence et de ne point faire de bruit, parce qu’ils cherchaient à s’approcher du mur pour surprendre la place. Ainsi la garnison que l’orage empêchait déjà de faire une surveillance très-exacte en fut encore détournée par cette réponse. Arrivés donc aux portes de la ville, à un certain signal les habitans nous y introduisent ; et lui toutes nos troupes, tant cavaliers que fantassins, après avoir laissé une partie des leurs dans la place, poussant en même temps un grand cri, firent une sortie sur le camp des assiégeans, lesquels ne s’y attendant pas, se crurent presque tous perdus.

4. Après avoir envoyé ce secours à Monte-Maior pour contraindre Pompée à en lever le siège, César marche sur Cordoue. En chemin, il fait prendre les devans à une troupe de cavalerie, suivie de braves soldats couverts de cuirasses, qui, en approchant de la ville, montèrent en croupe derrière les cavaliers, sans que les habitans aient pu le savoir. Lorsqu’ils en furent tout près, les ennemis sortirent en foule pour accabler la cavalerie ; mais les légionnaires dont on vient de parler, s’élançant de leurs chevaux, les attaquent avec tant de vivacité, que de cette multitude sortie de la ville il n’en rentra qu’un petit nombre. Effrayé de cette disgrâce, Sextus Pompée en donne aussitôt avis à son frère, pour qu’il vienne en diligence à son secours, avant que César ne se fût rendu maître de la place. Ainsi Cn. Pompée, qui était sur le point de prendre Maior, levant le siége de cette ville sur les lettres de son frère, marcha vers Cordoue avec toutes ses troupes.

5. Arrivé au Guadalquivir, qu’il ne put traverser à gué à cause de sa profondeur, César y fit jeter de grands mannequins remplis de pierres, sur lesquels il construisit un pont composé de deux rangs de grosses poutres, qui prenaient depuis la tête du pont jusqu’à l’autre bord vers la ville ; par ce moyen son armée passa en trois fois. Pompée se rendit au même endroit soutenu des siens, et campa de même en face de lui. Pour lui couper les vivres et lui intercepter toute communication avec la ville, César fit tirer un retranchement depuis son camp jusqu’au pont. Pompée suivit son exemple : en sorte que ces deux généraux se disputaient à qui s’emparerait le premier du pont ; c’est ce qui tous les jours donnait lieu à de légers combats, où tantôt l’un, tantôt l’autre avait l’avantage. Enfin, les deux partis s’étant échauffés, on en vient aux mains ; et tandis que de part