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soigneusement ses charmes ; maintenant même, je n’ai point encore vu son visage, et, certes, ce visage doit être charmant comme tout le reste de sa personne, à en juger d’après sa — d’après ce que j’ai vu. »

Cette dernière idée, en traversant son imagination, répandit la rougeur sur sa joue. Alarmé des sentiments auxquels il s’abandonnait, il eut recours à la prière ; il se leva de son lit, s’agenouilla devant sa belle madone, et la supplia de l’aider à étouffer ces coupables émotions ; puis il se recoucha et s’endormit.

Il se réveilla brûlant et fatigué. Durant son sommeil, son imagination enflammée ne lui avait présenté que les objets les plus voluptueux. Dans son rêve, Mathilde était devant lui, il revoyait encore sa gorge nue ; elle lui répétait ses protestations d’amour éternel ; elle lui entourait le cou de ses bras, et le couvrait de ses baisers ; il les rendait ; il la serrait passionnément sur sa poitrine, et — la vision s’évanouissait. Parfois son rêve lui offrait l’image de sa madone favorite, et il se figurait être à genoux devant elle ; il lui adressait des vœux, et les yeux du portrait semblaient luire sur lui avec une douceur inexprimable ; il pressait ses lèvres sur celles de la madone, et il les trouvait chaudes ; la figure s’animait, sortait de la toile, l’embrassait tendrement, et ses sens étaient incapables de supporter une volupté si exquise. Telles étaient les scènes qui occupèrent ses pensées pendant son sommeil ; ses désirs non satisfaits suscitaient devant lui les images les plus lascives et les plus excitantes, et il se ruait dans des joies qui jusqu’alors lui avaient été inconnues.

Il se jeta à bas de son lit, plein de confusion au souvenir de ses songes ; il n’était guère moins honteux lorsqu’il réfléchissait aux raisons qui, le soir précédent, l’a-