Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sonne à qui je voulusse la donner plus volontiers qu’à vous. Poursuivez donc votre dessein. Je vous accompagnerai demain soir, et je la mènerai moi-même à la maison du cardinal. Ma présence sera la sanction de sa conduite, et empêchera qu’elle n’encoure le blâme pour s’être enfuie du couvent. »

Le marquis le remercia en termes qui ne sentaient nullement l’ingratitude. Lorenzo alors lui apprit qu’il n’avait plus rien à craindre de l’inimitié de doña Rodolpha. Il y avait cinq mois que, dans un accès de colère, elle s’était rompu un vaisseau, et qu’elle avait expiré au bout de quelques heures. Puis il en vint à s’occuper des intérêts d’Antonia. Le marquis fut fort surpris d’entendre parler de cette nouvelle parente. Son père avait gardé jusqu’au tombeau sa haine contre Elvire, et n’avait jamais laissé soupçonner qu’il sût ce qu’était devenue la veuve de son fils aîné. Don Raymond dit à son ami qu’il n’était point dans l’erreur en le supposant prêt à reconnaître sa belle-sœur et son aimable nièce. Les préparatifs de l’enlèvement ne lui permettraient pas de les visiter le lendemain ; mais en attendant, il le chargea de les assurer de son amitié, et de fournir de sa part à Elvire toutes les sommes dont elle pourrait avoir besoin. Le jeune homme promit de le faire dès que leur demeure lui serait connue. Puis il prit congé de son futur beau-frère et retourna au palais de Médina.

Le jour était sur le point de paraître lorsque le marquis se retira dans sa chambre. Prévoyant que son récit prendrait plusieurs heures, et voulant se garantir de toute interruption, en revenant à l’hôtel il avait ordonné à ses gens de ne pas l’attendre : il fut donc un peu surpris, en entrant dans son antichambre, d’y trouver Théodore établi. Le page était assis près d’une table, une