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CXVII

on s’est trop pressé en Espagne de réfuter le système d’interprétation du nouveau commentateur. Il est de beaucoup le plus spirituel et le mieux informé des interprètes de Cervantes, et les révélations qu’il promet seront tout à fait neuves et très-curieuses, pour peu qu’elles ressemblent aux confidences que nous avons lues avec un plaisir très-vif, en regrettant seulement que les tendances du nouveau commentateur l’aient emporté bien au delà du but. Il est évident pour nous qu’il l’a dépassé, en abordant les écrits de Cervantes comme une espèce d’Apocalypse dont lui seul aurait la clef. Non qu’il n’y ait dans ces écrits beaucoup de vérités voilées et même des mystères et des obscurités ; mais il ne faut pas, sous prétexte d’une lumière pour nous conduire, nous donner un feu d’artifice qui nous éblouit sans nous éclairer.

Chercher dans la méditation et l’étude comparée des œuvres de Cervantes des indications propres à mieux expliquer sa vie et son génie, c’est déjà bien assez ; car il est à craindre qu’une interprétation qui se propose de trouver la réalité, la vérité, sous la fiction et à travers les caprices de la fantaisie, n’aboutisse à l’erreur. Mais prétendre découvrir une doctrine ésotérique et secrète, tout un système philosophique, social et politique dans les écrits de Cervantes, et un homme jusqu’ici à peu près inconnu sous l’écrivain, c’est une entreprise téméraire, pour ne pas dire insensée.

M. Diaz Benjumea aura beau déployer son