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vendre, ils se le disputent mordicus. Tout le monde les connaît : le ventru qui a le visage tout pelé s’appelle Bakchéï Otoutcheff, et le maigre qui ressemble à un squelette ambulant, c’est Tchepkoun Emgourtchéeff, — tous deux sont des amateurs forcenés, regarde le divertissement qu’ils vont nous donner.

Je ne répondis pas et prêtai mon attention à la scène que j’avais sous les yeux. Les messieurs qui tout à l’heure « poussaient » la jument avaient renoncé à l’acquérir et s’étaient réduits au rôle de simples spectateurs ; les deux Tatares se repoussaient l’un l’autre et à chaque instant frappaient dans la main du khan Djangar ; tremblant de tout leur corps, ils se cramponnaient à l’animal, objet de leur convoitise ; tour à tour chacun d’eux élevait la voix.

— En sus de l’argent, je donne encore pour elle cinq têtes (c’est-à-dire cinq chevaux), crie l’un.

— J’en donne dix ! réplique aussitôt l’autre.