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temps ni la possibilité de m’occuper : tu la nourriras et je te donnerai deux roubles par mois.

— Ce qui m’arrête, ce n’est pas la question des gages, mais comment viendrai-je à bout de cette tâche ?

— Des bêtises ! Voyons, tu es russe ? Un Russe vient à bout de tout.

— Oui, sans doute, je suis russe, mais je suis un homme et je n’ai pas ce qu’il faut pour nourrir un enfant à la mamelle.

— Ne t’inquiète pas de cela, dit-il, — j’achèterai une chèvre à un juif, tu n’auras qu’à la traire et à nourrir ma fille avec son lait.

Je répondis après un moment de réflexion :

— Sans doute, avec une chèvre il y a moyen de nourrir un enfant, mais il me semble tout de même qu’une femme conviendrait mieux pour cet office.

— Non, je t’en prie, réplique le barine, ne me parle pas des femmes : avec elles il arrive toujours des histoires ; d’ailleurs, je ne saurais où en trouver une ; mais toi, si tu ne