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une charrette qui suivait la même direction que moi. Dans cette charrette se trouvait un vieux paysan avec sa femme. « Monte, pauvre homme, me dirent-ils, nous te voiturerons. » Je m’assis à côté d’eux. Ils étaient fort affligés et, chemin faisant, ils m’apprirent la cause de leur chagrin : « Nous avons bien du malheur, notre fils est pris par la conscription et nous ne sommes pas assez riches pour lui acheter un remplaçant. » Ému de pitié, je leur dis : « Je partirais bien à sa place et cela gratis, uniquement pour vous rendre service, mais je n’ai pas de papiers. » À quoi ils répliquèrent : « C’est la moindre des choses ; tu n’as qu’à prendre le nom de notre fils, Pierre Serdukoff ; le reste nous regarde. »

— Eh bien ! répondis-je, — moi, cela m’est égal, je continuerai à vénérer comme mon patron Jean le Précurseur, mais je puis prendre tel nom qu’il vous plaira.

Sur ce, les deux vieillards m’emmenèrent à la ville où siégeait la commission de recrutement ; ils me présentèrent là comme leur