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Pour l’empêcher de poser son pied sur la chapka du hussard, je m’avisai d’un expédient qui, je pense, vous fera tous vous récrier sur ma prodigalité et, certes, vous n’aurez pas tort. Voici ce que j’imaginai : je pris un cygne dans mon portefeuille et le jetai aux pieds de la jeune fille en lui criant : « Écrase-le, marche dessus ! » Elle ne s’en souciait pas… Bien que mon cygne eût plus de valeur que le bonnet du hussard, elle n’y faisait aucune attention et continuait à donner la préférence au remonteur. Mais le vieux tsigane, — grâces lui en soient rendues ! — remarqua le fait et se mit à frapper du pied… Grouchka comprit et m’accepta pour cavalier… Elle s’approcha de moi, la tête baissée ; ses yeux fixaient le sol avec colère ; je commençai à sauter devant elle comme un vrai diable et, à chaque saut, je jetais un cygne sous son petit pied… Je la plaçais si haut dans mon estime que je me demandais si ce n’était pas elle, la maudite, qui avait fait le ciel et la terre… Cela ne m’empêchait pas de lui crier