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venait près de moi, eh bien ! je lui passais ma main sur la tête et je lui disais : « Va retrouver ta mère », mais cela arrivait rarement ; j’avais bien affaire d’eux !

— Vous étiez donc bien occupé pour n’avoir pas le temps de penser à vos enfants ?

— Ce n’est pas cela ; je ne faisais absolument rien, mais je m’ennuyais, j’avais le mal du pays.

— Ainsi vous avez passé dix ans dans les steppes sans pouvoir vous habituer à ce séjour ?

— Oui, je ne cessais de penser à la Russie… l’ennui me dévorait. Mes soirées surtout étaient pénibles. Parfois aussi, pendant les chaleurs de l’été, au milieu de la journée, lorsque le silence régnait dans le camp, lorsque tous les Tatares, fuyant les ardeurs de la canicule, s’étaient retirés dans leurs tentes et s’y livraient au sommeil, je risquais un coup d’œil au dehors et, d’un côté comme de l’autre, j’apercevais la même chose… Une plaine d’une étendue immense, brûlée par un soleil implacable ; de l’herbe, une nature sau-