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l’autre côté une lumière et curieux de savoir si elle ne brillait point dans la chambre de quelque belle, ébranle l’obstacle, qui cède. Nous avançons, protégés par l’obscurité, et par une fenêtre ouverte le dialogue suivant arrive à nos oreilles :

— Encore sur la cuvette, Julie !… Êtes-vous bien sûr que l’eau froide soit bonne pour calmer les inquiétudes dont vous souffrez ?

— Aussi, ma sœur, ai-je mis de l’eau tiède.

— Je ne sais si cela est meilleur.

— Ah ! Nanine !

— Julie, vraiment, ce que le bon Dieu a fait en nous privant de nos maris, c’est avoir muselé la nature.

— Je vous en réponds. J’ai là-dessus de terribles choses à vous dire. Je m’essuie, je reviens près de vous.

— Julie, puisque c’est vous qui gouvernez la maison, vous devriez bien me donner de vieille serviettes. Les neuves me grattent trop fort. Je suis devenue si sensible de là…

— Je sens nuit et jour des chatouillements ! Le sang m’incommode ! J’ai des chaleurs…

— J’ai des palpitations de cœur insupportables…

— Allons-nous à l’église faire notre prière du soir, Nanine ?

— Hélas ! Julie, nous avons besoin de prier.

La lumière s’éteignit. Les deux sœurs venaient sans doute de sortir. Calprenède et moi nous nous regardâmes.

— Par quel moyen prendre ces deux tourterelles sans mâles ?

— Comment tirer ces deux bons coups cuits à point ?

Comme nous rêvions depuis un moment, Calprenède s’écria :