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Il y a des cons (pourquoi reculer devant les mots ?) qui sentent le fauve ; il y en a qui ont la saveur de la framboise.

Suzanne se tenait la tête renversée sur mon épaule ; elle jouissait… Excusez-moi si je vous dis que je mis alors mon glaive à l’air et qu’elle l’empoigna de ses deux mains.

— Apprends-moi comment il faut faire, dit-elle.

Sa robe de tulle rose en fut tout inondée.

Cependant le bal était près de sa fin. Il fallait que Suzanne retournât au salon. J’essuyai sa robe. Pour elle, me montrant une armoire, elle me dit :

— Cache-toi là jusqu’à ce que je revienne.

J’obéis. Cette armoire où j’entrai respirait une odeur enivrante. Là étaient suspendues les toilettes que Suzanne avait portées. Je me mis dans ma cachette à réfléchir à mon double bonheur. Je n’épousais point Suzanne et j’allais l’avoir toute à moi ! Je n’attendis pas longtemps son retour… Suzanne rentra, suivie de sa femme de chambre. Je me renfonçai dans ma cachette entre une jupe de soie bleue et une mante de dentelle, ramenant les plis de la jupe sur mon visage et ménageant seulement un passage à l’un de mes yeux.

— Dépêchons ! dit Suzanne en entrant… Vite Julie, j’ai grande envie de dormir ce soir.

Elle dégrafa son corsage elle-même. Sa robe tomba.

— Mademoiselle, dit Julie, ne se fera donc point de coiffure de nuit ?

— Non ; ôtez-moi seulement ces fleurs.

La jupe de dessous suivit la robe.

— Que mademoiselle est pressée !… Mademoiselle s’est-elle amusée ce soir ?

— Oui, oui… Ne bavardez pas, Julie.