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une grosse pierre. J’avais passé ma main à travers les barreaux de fer. Inutile de dire qu’il faisait nuit.

Pas le plus petit moyen d’échanger un baiser. Rien que ce stérile chatouillement que je ne pouvais encore appliquer d’un doigt bien sûr.

Aussi je n’éveillai pas même un soupçon de plaisir chez Valentine. D’ailleurs elle me rendit mes caresses. Allongeant la main à son tour à travers les barreaux, elle la fit jouer suivant la bonne leçon que je lui donnais. Le résultat fut prompt. Ma semence tomba par terre.

— C’est ce qu’on appelle plumer l’oie, dis-je à Valentine.

Et dire qu’il ne dépendait que de moi d’entrer dans cette maison, d’y trouver une occasion de tenir cette jolie fille toute nue dans mes bras, d’échauffer cette statue vivante ! Oui, mais il fallait baiser sa mère !

Il faut toujours baiser la mère ! C’est une dure nécessité. Madame de Meissiat avait bien la cinquantaine. Mais elle était toute flamme, — un vrai feu grégeois, qui, une fois attaché quelque part, ne cesse de mordre et ne s’éteint plus. Elle avait juré qu’elle m’aurait, qu’elle me tiendrait enseveli sous l’océan de sa vieille chair. Et Valentine le savait !

Et cette nuit-là, ayant en vain attendu la jouissance de mes attouchements maladroits à travers les barreaux de fer, n’ayant rien senti, et espérant tout d’un long baiser et d’un véritable embrassement que nous pourrions prendre sans contrainte, elle me dit :

— Richard, il vous en coûterait bien peu d’être aimable pour ma mère !

Le lendemain, à deux heures de l’après-midi, je m’exécutai.