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ger? Non. Que m’importe dès-lors! Mais il paraît être un personnage! C’est son affaire, et celle des gens qui le prennent pour tel. Pour moi j’ai à qui plaire, à qui me soumettre, à qui obéir: c’est Dieu, et ceux qui viennent après lui. C’est moi-même que Dieu a préposé à ma garde; c’est à moi seul qu’il a soumis ma faculté de juger et de vouloir; et il m’a donné des règles pour en bien user. Lorsque je les applique aux syllogismes, je ne me préoccupe pas de ceux qui parlent autrement; lorsque je les applique aux raisonnements équivoques, je ne m’inquiète de personne; pour quoi donc dans les choses plus importantes les critiques me font-elles de la peine? Qu’est-ce qui fait que je me trouble ainsi? Une seule chose: c’est que je ne me suis pas exercé sur ce point-là. Quiconque sait, en effet, dédaigne l’ignorance et les ignorants; et je ne parle pas seulement des savants, mais aussi des gens de métiers. Amène-moi le savetier que tu voudras, et dans ce qui est de son art il se moquera de tout le monde. Amène-moi de même le charpentier que tu voudras.

Il faut, avant tout, avoir ces idées présentes à la pensée, et ne rien faire qui soit en contradiction avec elles; il faut bander son âme vers ce but, de ne poursuivre aucune des choses qui sont hors de nous, aucune de celles qui ne sont pas à nous. Acceptons-les comme en dispose celui qui a pouvoir sur elles. Les choses qui relèvent de notre libre arbitre, il faut les vouloir sans restriction, mais les autres, comme on nous les donne. Il faut de plus nous rappeler qui nous sommes, et quel est notre nom, et nous efforcer de faire ce qui convient dans