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CHAPITRE VI




Sur les gens qui se plaignent d’être un objet de pitié.

Je suis ennuyé, dit un tel, d’être un objet de pitié. — Cette pitié dont tu es l’objet est-elle ton fait ou celui des gens qui te plaignent? — Qu’entends-tu par là? — Est-il en ton pouvoir de la faire cesser? — En mon pouvoir: je n’ai qu’à leur montrer qu’il n’y a pas lieu de me prendre ainsi en pitié. — Eh bien! dépend-il de toi qu’il n’y ait pas lieu de te prendre en pitié, ou cela n’en dépend-il pas? Je crois, pour ma part, que cela n’en dépend pas. — Mais ces gens-là me prennent en pitié, non pour les choses où il y aurait peut-être lieu de le faire, pour mes fautes; mais pour ma pauvreté, pour ma condition de simple citoyen, pour mes maladies, pour la mort des miens, et pour cent autres causes pareilles. — Eh bien! à quoi t’apprêtes-tu? A persuader à la multitude qu’aucune de ces choses n’est un mal, et qu’il est possible de vivre heureux, même sans richesses, sans charges, et sans dignités? Ou bien à poser devant elle comme riche et puissant? Le second parti est d’un imposteur, d’un vaniteux, d’un rien qui vaille. Et vois ce qu’il te faudra pour jouer cette comédie. Il te faudra emprunter des esclaves, te procurer un certain nombre de vases d’argent, les poser en évidence,