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nombre des athlètes qui méritent de vaincre, ou du nombre de ceux qui parcourent toute la terre en se faisant battre. De quoi t’irrites-tu? Il n’y a pas d’arène sans foule tumultueuse. Il y faut nombre de gens pour vous préparer, nombre de gens pour crier, nombre de surveillants, nombre de spectateurs. » — « Mais je voulais vivre au sein du calme. » — Gémis donc et pleure; tu l’as bien mérité! Peut-il, en effet, y avoir pour l’ignorant qui désobéit aux ordres des Dieux un châtiment plus grand que de se désoler, de se lamenter, de porter envie à d’autres, en deux mots, d’être malheureux et misérable? N’est-ce pas là un lot auquel tu voudras te soustraire?

— « Et comment m’y soustraire? » — N’as-tu pas entendu dire bien des fois qu’il te faut supprimer en toi tout désir, n’avoir d’aversion que pour des choses qui relèvent de ton libre arbitre, être indifférent à tout le reste, à ton corps, à ta fortune, à ta réputation, à tes livres, au tumulte de la foule, aux magistratures, à la vie privée? Car, de quelque côté que tu inclines, te voilà esclave; tu as un maître; on te fait obstacle; on te contraint; tu dépends tout entier des autres.

Aie plutôt à l’esprit ce vers de Cléanthe:

« Conduisez-moi, ô Jupiter, ô destinée! »

Dis-leur: « Voulez-vous me conduire à Rome? Eh bien, à Rome! A Gyaros? Eh bien, à Gyaros! A Athènes? Eh bien, à Athènes! En prison? Eh bien, en prison! » Si tu dis une seule fois: « Quand partira-t-on pour Athènes? » c’en est fait de toi. Inévitablement ce désir, tant qu’il ne sera