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CHAPITRE IV




Sur ceux qui voudraient vivre dans l’inaction.

Rappelle-toi que l’amour du pouvoir et de la richesse u’est pas le seul qui nous abaisse et qui nous assujettisse à d’autres hommes, mais que l’amour de l’inaction, des loisirs, des voyages, ou même de la lecture, en fait autant. En un mot, quels que soient les objets extérieurs, le prix que nous y attachons nous assujettit à autrui. Quelle différence y a-t-il, en effet, à désirer le sénat, ou à désirer de ne pas être sénateur? Quelle différence y a-t-il à désirer le pouvoir, ou à désirer d’être simple particulier? Quelle différence y a-t-il à dire: « Je suis malheureux de n’avoir rien à faire, et d’être enchaîné à mes livres comme un cadavre, » ou à dire: « Je suis malheureux de ne pas avoir le loisir de lire? » Un livre est une chose extérieure et qui ne relève pas plus de notre libre arbitre que les saluts et le pouvoir. Ou bien encore, pourquoi veux-tu lire? Dis-le moi. Si tu n’as d’autre but que de t’amuser ou d’apprendre quelque chose, tu es bien frivole et bien facile à satisfaire. Si tu as en vue le but que tu dois, quel peut-il être si ce n’est le bonheur? Et alors, si la lecture ne te donne pas le bonheur, à quoi te sert-elle? — « Mais elle me le donne, dis-tu; et