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patrie. Ce n’est pas qu’il cherchât jamais à paraître faire quelque chose en vue d’autres que lui; mais il se rappelait que tout ce qui arrive vient d’elle, que tout se fait pour elle, et par l’ordre de celui qui la gouverne. Aussi, vois ce qu’il dit et ce qu’il écrit: « C’est pour cela, dit-il, ô Diogène, qu’il t’est possible de parler du ton que tu voudras au roi des Perses, ou à Archidamus, le roi de Lacédémone. Est-ce parce qu’il était né de parents libres? Mais alors ce serait comme fils d’esclaves que tous les Athéniens, tous les Lacédémoniens, tous les Corinthiens, ne pouvaient pas parler à ces rois du ton qu’ils voulaient, tremblaient devant eux, et les servaient. « Pourquoi donc cela m’est-il possible? » dit-il. « Parce que je ne regarde pas mon corps comme à moi; parce que je n’ai besoin de rien; parce que la loi est tout pour moi, et que rien autre ne m’est quelque chose. » Voilà ce qui lui donnait le moyen d’être libre.

Afin que tu ne dises pas que je te montre comme exemple un homme dégagé de tout lien social, un homme n’ayant ni femme, ni enfant, ni patrie, ni amis, ni parents, pour le faire plier ou dévier, prends-moi Socrate, et vois-le ayant une femme et des enfants, mais comme des choses qui n’étaient pas à lui; ayant une patrie, mais dans la mesure où il le fallait, et avec les sentiments qu’il fallait; ayant des amis, des parents, mais plaçant au-dessus d’eux tous la loi et l’obéissance à la loi. Aussi, quand il fallait aller à la guerre, il y partait le premier, et s’y épargnait au danger moins que personne; mais, lorsque les tyrans lui ordonnèrent d’aller chez Léon, convaincu qu’il se déshonore