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plus être asservi par personne. Aussi, quand il fut pris, comment en agit-il avec les pirates? En fût-il un seul qu’il appelât son maître? (Je ne parle pas ici du mot, car je ne crains pas le nom par lui-même, mais de la disposition d’esprit d’où part le mot.) Quels reproches il leur fait, parce qu’ils nourrissent mal leurs prisonniers! Et de quelle façon fut-il acheté? Cherchait-il un maître? Non: un esclave. Et, quand il eut été acheté, comment se conduisit-il avec son maître? Dès le premier instant il discute avec lui: « Ce n’est pas ainsi qu’il devrait se vêtir; pas ainsi qu’il devrait se raser; et ses enfants, voici comment il devrait les élever.» Et qu’y a-t-il là d’étonnant? Si cet homme eût acheté un maître de gymnastique, en aurait-il fait, au gymnase, son subordonné ou son maître? Même question, s’il avait acheté un médecin, ou un architecte. C’est ainsi qu’en chaque chose celui qui sait doit nécessairement commander à celui qui ne sait pas. Celui donc qui a la science générale de la vie, peut-il être autre chose que le maître? Qu’est-ce qui commande sur un vaisseau? Le pilote. Pour quoi? Parce que quiconque lui désobéit s’en trouve mal. — « Eh bien! cet homme peut me faire écorcher ou mettre aux fers. » — Le peut-il donc impunément? — « Il me semblait que oui. » — S’il ne peut le faire impunément, il n’a pas la permission de le faire: or, personne ne saurait impunément faire une injustice. — « Et quelle est la punition de celui qui met son esclave aux fers? Quelle crois-tu qu’elle soit? » — Le fait même de le mettre aux fers; et toi-même en conviendras, si tu veux te rappeler que l’homme n’est pas une