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ter l’assemblée; car, lorsqu’ils y étaient, ils ne s’y conduisaient pas comme à une fête, et n’y jouaient pas le rôle qu’ils devaient y jouer. Loin de là, ils se plaignaient, ils accusaient Dieu, le sort, leurs compagnons, ne se rappelant pas tout ce qu’ils avaient reçu, et toutes les ressources qui leur avaient été données contre l’adversité, telles que la grandeur d’âme, la noblesse de cœur, le courage, et cette liberté même qui est l’objet de nos recherches présentes. — « Mais pourquoi donc ai-je reçu ces objets qui m’entourent? » — Pour t’en servir. — « Combien de temps? » — Tant que voudra celui qui te les a prêtés. — « Mais s’ils me sont indispensables? » — Ne t’y attache pas, et ils ne le seront point. Ne dis pas toi-même qu’ils te sont indispensables, et ils ne le seront pas.

Voilà les réflexions qu’il te faudrait faire depuis le matin jusqu’au soir, en commençant par les objets du moindre prix et les plus fragiles, ta marmite et ta coupe. Viens-en après cela à ton vêtement, à ton chien, à ton cheval, à ton champ, puis à toi-même, à ton corps et à ses parties, à tes enfants, à ta femme, à tes frères. Regarde de tous les côtés, puis rejette hors de toi tout ce qui doit y être rejeté; épure tes jugements; que rien de ce qui n’est pas à toi ne s’attache à toi ni ne s’y incarne, pour te faire souffrir quand il s’en détachera. Puis dis, en t’exerçant ainsi tous les jours, comme tu t’exerces là-bas, non pas que tu es philosophe (car le mot serait outrecuidant), mais que tu t’affranchis; car c’est là qu’est la vraie liberté. Ce fut celle-là que Diogène reçut d’Antisthène; et, quand il l’eut reçue, il déclara qu’il ne pouvait