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qualité que tu voudras? — Non. — Et des esclaves? — Non. — Et des vêtements? — Non. — Et une maison? — Non. — Et des chevaux? — Rien de tout cela. — Et si tu veux voir vivre toujours tes enfants, ou ta femme, ou ton frère, ou tes amis, cela dépend-il de toi? — Pas davantage.

N’as-tu donc rien dont tu sois le maître, qui ne dépende que de toi, et que nul ne puisse t’enlever? Ou bien as-tu quelque chose qui soit dans ces conditions? — Je n’en sais rien. — Regarde donc de la façon que voici, et examine la chose. Peut-on te forcer à croire ce qui est faux? Non. Sur le terrain de la croyance, il n’y a donc pour toi ni entraves, ni contrainte. — Accepté. — Marchons donc. Quel qu’un peut-il te forcer à vouloir ce que tu as résolu de ne pas faire? — On le peut, car, en me menaçant de la mort ou de la prison, on me force à vouloir. — Mais, si tu méprisais la mort ou la prison, t’inquiéterais-tu encore de ces menaces? — Non. — Est-il ou non en ton pouvoir de mépriser la mort? — En mon pouvoir. — Vouloir est donc aussi en ton pouvoir? Ou ne serait-ce pas vrai? — Oui, c’est en mon pouvoir. — Et ne pas vouloir, au pouvoir de qui est-ce? — Au mien encore. Mais pourtant, si, quand je veux me promener, cet homme m’arrête? — Que peut-il? Arrêter ta faculté de vouloir? — Non, mais mon corps. — Oui, comme une pierre. — Soit; mais il n’en est pas moins vrai que je ne me promenerai pas. — Et qui t’a dit que te promener était en ton pouvoir sans empêchement possible? Il n’y a qu’une chose que j’aie dit être affranchie de toute contrainte,la volonté; mais dès que tu as besoin de ton corps et de son ministère,