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choses les plus utiles; donc, il est un Dieu. » Une fois que nous avons ajouté à tort: « Cet homme a dans ses mains les choses les plus utiles, » il faut forcément en arriver à une conclusion fausse.

Qu’est-ce donc qui fait de l’homme un être sans entraves et maître de lui? Ce n’est pas la richesse, ce n’est pas le consulat, ce n’est pas le gouvernement d’une province; ce n’est pas même la royauté. Il nous faut trouver autre chose. Or, qu’est-ce qui fait que, lorsque nous écrivons, il n’y a pour nous ni empêchements ni obstacles? — La science de l’écriture. — Et quand nous jouons de la harpe? — La science de la harpe. — Donc, quand il s’agira de vivre, ce sera la science de la vie.

Mais ceci n’est qu’une exposition générale; vois les choses dans le détail. Quand on désire quelque chose qui dépend d’un autre, peut-on être à l’abri de tout empêchement? — Non. — De tout obstacle? — Non. — On ne peut donc pas non plus alors être libre. Vois plutôt. N’avons-nous rien qui dépende denous seuls? Ou tout ce que nous avons en dépend-il? Ou bien encore est-il des choses qui dépendent de nous, tandis que les autres dépendent du dehors? — Que veux-tu dire? — Quand tu veux que ton corps soit au complet, dépend-il de toi qu’il le soit ou non? — Cela ne dépend pas de moi. — Et quand tu veux qu’il soit en bonne santé? — Non plus. — Quand tu veux qu’il soit beau? — Non plus. — Quand tu veux qu’il vive ou qu’il meure? — Non plus. — Ton corps relève donc d’autrui; il est dans la dépendance de quiconque est plus fort. — Oui. — Dépend-il de toi d’avoir un champ à ta volonté, aussi étendu que tu le voudras, et de la