Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/343

Cette page n’a pas encore été corrigée

tous les hommes, aux Athéniens, aux Corinthiens, aux Romains indifféremment, non pas des revenus et des impôts, non pas de la paix et de la guerre, mais du bonheur et du malheur, de la félicité et de l’infortune, de l’esclavage et de la liberté? Quand un homme s’occupe d’un tel gouvernement, me demanderas-tu s’il s’occupe de gouvernement? Demande-moi encore s’il sera magistrat; je te répon drai de nouveau: « Imbécile! y a-t-il une plus haute magistrature que celle qu’il exerce? »

Un tel homme a cependant besoin que son corps soit en bon état. Car, s’il se présente phthisique, maigre et pâle, son témoignage n’aura plus le même poids. Ce n’est pas assez qu’il prouve aux hommes ordinaires, en leur découvrant son âme, que l’on peut être en belle et bonne situation sans tout ce qu’ils admirent; il faut encore qu’il leur montre par son corps qu’une vie simple, frugale et au grand air, ne nuit pas à la santé. (Il faut qu’il puisse leur dire): « Vois comme nous en rendons témoignage, moi et mon corps. » C’est ce que faisait Diogène: il se promenait brillant de santé, et son corps attirait les regards de la foule. Si le Cynique fait pitié, il a l’air d’un mendiant; tout le monde se détourne de lui; sa vue choque tout le monde. Il ne faut pas qu’on le voie sale, et qu’il éloigne de lui les gens, même par ce petit côté; il faut de la propreté jusque dans sa négligence, qui doit avoir quelque chose de séduisant.

Il faut encore au Cynique une certaine grâce naturelle, et beaucoup de finesse; sinon, ce ne sera qu’un pédant et pas autre chose. Il faut qu’il soit toujours en état, toujours en position de faire face