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combats; c’est à toi que cela incombe, à toi que cela revient, puisque tu peux le faire. Toi, tu peux conduire une armée contre Ilion: sois Agamemnon. Toi tu peux combattre Hector en combat singulier: sois Achille. » Si Thersite se présentait, et revendiquait le commandement, il ne l’obtiendrait pas; ou, s’il l’obtenait, il n’y gagnerait que de se couvrir de honte devant un plus grand nombre.

Toi aussi, considère l’affaire avec soin: elle n’est pas ce qu’elle te semble. « Je porte dès maintenant, dis-tu, un manteau grossier; j’en porterai un encore alors. Je dors dès maintenant sur la dure; j’y dormirai encore alors. J’y joindrai une besace et un bâton; et je me mettrai à me promener, en interrogeant et en insultant tous ceux qui se trouveront devant moi. Je ferai des reproches à tous ceux que je verrai s’épiler la tête, s’arranger les cheveux, ou se promener avec des vêtements écarlates. » Si c’est ainsi que tu te représentes la chose, va-t’en bien loin d’elle; n’en approche pas; elle n’a que faire de toi. Mais si tu te représentes la chose comme elle est, et que tu ne recules pas devant, eh bienl regarde ce que tu entreprends.

D’abord, pour ce qui t’est personnel, il faut qu’on ne te voie plus rien faire qui ressemble à ce que tu fais maintenant; n’accuse plus ni Dieu ni homme; retranche de toi tout désir; ne cherche à éviter que ce qui dépend de ton libre arbitre; point de colère, point d’indignation, point de haine, point de sensiblerie; ne te laisse prendre ni aux jeunes filles, ni à la gloriole, ni aux jeunes garçons, ni aux