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nous les perturbations, les désordres, l’idée que nous sommes malheureux et misérables, les plaintes, les gémissements, la haine; voilà ce qui fait les haineux et les jaloux; voilà ce qui nous empêche d’écouter les bonnes raisons. En seconde ligne est le point relatif au devoir. Car nous n’avons pas à être insensibles comme les statues, mais à remplir nos obligations naturelles et adventices, soit au nom de la piété, soit comme fils, comme frère, comme père, comme citoyen.

Le troisième point ne regarde que ceux qui sont déjà bien avancés: il a pour objet de les rendre infaillibles, en empêchant qu’aucune idée se glisse en eux à leur insu et sans être examinée, même dans le sommeil, même dans l’ivresse, même dans les moments d’humeur noire. Ce point-là est au-dessus de nous[1]. Mais les philosophes de nos jours laissent de côté le premier et le second point, pour s’occuper uniquement de ce troisième; et ils sont tout entiers aux arguments captieux, interrogatifs, hypothétiques, mensongers. Il est vrai, en effet, qu’on doit en pareille matière aussi, quand elle se rencontre, savoir se préserver de l’erreur; mais qui doit cela? Le Sage. Toi donc, n’y a-t-il que cela qui te manque? Es-tu parfait dans tout le reste? Ne faiblis-tu jamais en face d’un écu? Si tu aperçois une belle fille, sais-tu résister à sa vue? Si ton voisin fait un héritage, n’en éprouves-tu aucune peine? Rien ne te manque-t-il aujourd’hui, que d’être iné-

  1. J’ai passé dans cet endroit deux φησι, qui ne peuvent se rapporter qu’à Epictète, d’après l’ensemble du chapitre, et qui partant ne sont que des pléonasmes de rédaction, qui ne servent qu’à embrouiller les idées.