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CHAPITRE XXIII




Sur le talent de la parole.

Le livre que tout le monde lit avec le plus de plaisir et de facilité, est celui qui est écrit avec les caractères les plus nets. Les discours qu’on écoutera toujours le plus facilement, seront donc aussi ceux qui s’exprimeront dans les termes qui auront le meilleur air et qui seront les plus convenables. Il ne faut donc pas dire que le talent de l’expression n’existe pas. Ce serait à la fois le mot d’un impie et d’un peureux.

Ce serait le mot d’un impie, car ce serait faire fi des grâces qui nous viennent de Dieu, tout aussi bien que si l’on enlevait à l’homme l’usage de la vue, de l’ouie, et de la parole même. Est-ce donc sans intention que Dieu t’a donné des yeux? Est-ce donc sans intention qu’il a mis en eux un principe de vie si puissant et si subtile, qu’ils vont chercher au loin les objets visibles pour s’en former les images? Et quel messager est aussi prompt, aussi exact? Est-ce sans intention encore qu’il a donné à l’air intermédiaire de telles qualités et une telle vertu, qu’en agissant sur lui d’une certaine façon, les objets visibles arrivent jusqu’à nous? Est-ce sans intention qu’il a fait cette lumière, qui, si elle manquait, rendrait inutile tout le reste?