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les autres? Pourquoi vous revêtir des habits d’autrui, et vous promener de par le monde après avoir dérobé et volé un nom et un rôle qui ne vous appartiennent pas?

Et maintenant, moi, je suis votre maître, et vous, vous étudiez sous moi. Mon but à moi, c’est de faire enfin de vous des hommes affranchis de toute entrave, de toute contrainte, de tout obstacle, libres, tranquilles, heureux, qui tournent leurs regards vers Dieu dans les petites comme dans les grandes choses. Et vous, vous êtes ici pour apprendre et pour travailler à devenir ces hommes. Pourquoi donc l’œuvre ne s’achève-t-elle pas? Si vous avez le même but que moi, et avec le même but les moyens qu’il faut pour l’atteindre, que nous manque-t-il encore? Quand je vois un ouvrier avec ses matériaux près de lui, je n’attends plus que son ouvrage. Nous avons ici l’ouvrier et les matériaux; que nous manque-t-il encore? Est-ce que la chose ne peut pas s’apprendre? Elle le peut. Est-ce qu’elle n’est pas en notre pouvoir? Il n’y a qu’elle au monde qui y soit. Ni la richesse, ni la santé, ni la réputation, ni quoi que ce soit, n’est en notre pouvoir, si ce n’est le bon emploi des idées; voilà la seule chose qui de sa nature échappe à toute contrainte et à tout empêchement. Pourquoi donc notre œuvre ne s’achève-t-elle pas? Dites m’en la cause. Si elle ne s’achève pas, cela tient-il à moi, à vous, ou à la nature même de la chose? La chose en elle-même est possible, et la seule qui soit en notre pouvoir. Il reste donc que cela tienne à moi ou à vous, ou, ce qui est plus exact, à moi et à vous. Eh bien! voulez-vous que nous nous