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défauts à leur tour se fortifient par des actes coupables : l’impudence par des actes impudents ; la déloyauté par des actes déloyaux ; l’amour de la médisance par des médisances ; l’irascibilité par la colère, et l’avidité par la supériorité des recettes sur les déboursés.

C’est pour cela que les philosophes nous avertissent qu’il ne suffit pas d’apprendre la théorie, qu’il faut y joindre encore la méditation, puis la pratique ; car il y a longtemps que nous sommes habitués à faire le contraire de ce qu’ils nous enseignent, et à suivre dans la pratique des idées qui sont le contraire des vraies. Si donc nous ne faisons pas à leur tour passer dans la pratique les idées vraies, nous ne serons jamais que des gens qui expliquent les pensées des autres. Aujourd’hui quel est celui de nous qui ne peut disserter avec art sur le bien et sur le mal ; montrer que telles choses sont bonnes, telles autres mauvaises, telles autres indifférentes ; que les bonnes sont les vertus et tout ce qui s’y rattache ; que les mauvaises sont leurs contraires ; que les choses indifférentes sont la richesse, la santé, la réputation ? Mais si, au milieu de notre dissertation, il survient un bruit un peu fort, ou si quelqu’un des assistants se moque de nous, nous voici décontenancés ! Philosophe, où donc est ce que tu disais ? D’où le tirais-tu quand tu le disais ? Cela était sur tes lèvres, et rien de plus. Pourquoi déshonorer des ressources que tu n’as pas su t’approprier ? Pourquoi te jouer de ce qu’il y a de plus respectable ? Autre chose est de faire comme ceux qui serrent dans leur cellier du pain et du vin, ou de faire comme ceux qui s’en