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à priori. Car c’est faute de cela que nous n’apprécions pas exactement ce qui arrive. Quand nous voulons juger ce que pèse une chose, nous ne la jugeons pas à la légère, pas plus que nous ne déclarons à la légère qu’elle est droite ou qu’elle est courbe. En un mot, partout où nous croyons qu’il nous importe de connaître la vérité sur une question, nous ne procédons jamais à la légère. Mais qu’il s’agisse de la première et unique cause de nos vertus ou de nos vices, de notre bonheur ou de notre malheur, de notre félicité ou de notre infortune, alors, et là seulement, nous agissons à la légère et au hasard ! Nous n’y usons de quoi que ce soit qui ressemble à une balance ; de quoi que ce soit qui ressemble à une règle ! Quelque chose me paraît bon, et ce quelque chose est fait aussitôt. — Puis-je en effet prétendre à être meilleur qu’Achille ou qu’Agamemnon ? Et, quand c’est en suivant ce qui leur paraissait bon, qu’ils ont causé et souffert tant de maux, ne sera-ce pas assez pour moi qu’une chose me paraisse bonne ? Quelle tragédie a un autre point de départ ? Qu’est-ce que l’Atrée d’Euripide ? une manière de voir. Qu’est-ce que l’Œdipe de Sophocle ? une manière de voir. Et Phœnix ? une manière de voir. Et Hippolyte ? une manière de voir.[1].......... — Mais comment appelle-t-on ceux qui obéissent à toutes leurs idées ? des insensés. — Eh ! faisons-nous autre chose ?


  1. Ici se place une phrase évidemment altérée, et partant inintelligible.