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SUR MON CHEMIN

puis que je suis sort du collège, je n’ai eu qu’un but dans la vie : les palmes académiques. J’avais tous les prix de ma classe et celui de natation ; les palmes, c’était encore une façon d’avoir un prix. Au quartier latin, quand j’étais étudiant, je n’avais garde de manquer les travaux de la section de droit à l’A. On m’avait dit qu’une grande assiduité conduisait au ruban. Plus tard, je lis des conférences, toujours pour le ruban. Enfin, avocat stagiaire, je crus bien le tenir. Comme on m’affirmait qu’une fois inscrit au tableau de l’Ordre, on ne vous palmait plus, les palmes étant au-dessous de cette brillante position, je restai dix ans avocat stagiaire. Du coup, je n’allais plus aux conférences, et ne remplissais aucun de mes devoirs, pour que le conseil de l’Ordre fût dans la nécessité de m’imposer une prolongation de stage, tous les deux ans. On m’avait appelé : « le doyen des avocats stagiaires ». Quand je passais dans la galerie Marchande, au Palais de Justice, on disait derrière moi : « Voilà le doyen des avocats stagiaires qui passe ; il sera officier d’académie l’année prochaine. »

Un jour vint où le conseil de l’Ordre me mit en demeure de prendre un parti. Ce ne fut pas long. Le lendemain j’étais journaliste. On venait de me confier qu’il n’y a rien de tel que d’être journaliste pour devenir officier d’académie. Et maintenant que je vous ai raconté tout ça, je ne vois point pourquoi je vous cacherais quelque chose. Sachez donc comment je fis connaissance de tous