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SUR MON CHEMIN

m’ont promis les palmes académiques. Me voilà bien tranquille ; je puis attendre.

Il y a des gens qui font métier de mépriser les palmes académiques. Ce sont le plus souvent des plaisantins qui savent qu’ils ne les auront jamais et qui se vengent, par quelques traits sans esprit, de leur peu de mérite et de leur absence totale d’influence. À chaque promotion, vous ne pouvez éviter ces gens qui vous disent, en regardant votre boutonnière (c’est insupportable), qu’il faut pardonner cette fois encore au ministre ; qu’il se trouvait dans un embarras cruel n’ayant que deux mille palmes à distribuer sur vingt mille demandes. « Et songez, ajoutent-ils, que ces vingt mille demandes y avaient toutes également droit ! » On se retient pour ne pas les gifler.

Ce sont encore ces gens qui ont des histoires vieillôttes, des anecdotes sans authenticité, des contes à dormir debout, qu’il nous faut entendre sans se fâcher, de peur de passer pour un imbécile. Ils ne tarissent point sur les erreurs bien naturelles qui accompagnent chaque distribution ; ils ont toujours prêt un instituteur qui reçoit le Mérite agricole et un garde champêtre auquel on envoie le ruban violet, et, comme la chose se passe naturellement dans le même patelin, elle finit par la dépêche traditionnelle des intéressés au ministre, annonçant que tout est arrangé et que les deux fonctionnaires ont procédé d’eux-mêmes à l’échange nécessaire. Ou bien encore ces messieurs se révèlent mathématiciens : ils