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À TRAVERS LA CORSE

M. Lockroy s’avança, lui tendit largement la main, serra longuement la sienne, agita à plusieurs reprises la tête, exprimant ainsi une admiration qui, officiellement, devait rester muette.

Le chef de cabinet Ignace prenait des instantanés de brigands avec une hâte fébrile. Le général Brunet faisait fonctions de gardien de la paix, refoulant les curieux à seule fin que le général Delambre dessinât plus facilement ce héros national.

Le commissaire spécial lui apporta une boîte de cigares. M. Lockroy ne daigna point adresser la parole au capitaine qui avait osé arrêter cet homme…

Tout le monde comprit ! Le malheureux aussi. Il gémit : « Ma carrière est brisée ! » Bellacoscia s’éloigna d’un pas naturel, sans forfanterie, le fusil en bandoulière, fumant le cigare du commissaire spécial, une main appuyée au poignard à manche d’ivoire que lui donna jadis Edmond About en lui recommandant de « ne pas le laisser dans la plaie », et regardant à la montre merveilleuse que lui donna le roi de Saxe s’il n’était point l’heure du déjeuner.

Je l’arrêtai un instant :

— Pardon, lui fis-je. Tous ces bandits qui sont avec vous, ce sont de vrais bandits ?

— Eh non ! me répondit-il en haussant les épaules : ce sont de la fripouille.

Nous arrivâmes quatre heures plus tard à