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LE CHÂTEAU NOIR

« Et toi, La Candeur, qu’est-ce que tu dis ?

— Je dis que je m’en f…, moi, des plans de la mobilisation bulgare, et que ce n’est pas encore pour ça que je m’emploierai à me faire casser la g… !… Les Bulgares et les Turcs, je les mets tous dans le même sac !… je dis que je regrette ma manille de la brasserie de Montmartre !…

— Moi aussi, je m’en f… des plans de la mobilisation bulgare !… gronda Rouletabille en regardant La Candeur sous le nez, Mais je vais te dire : il y a une chose dont je ne me f… pas, pour parler ton langage d’apache.…..

— J’aime mieux les apaches que les Bulgares !…

— Vas-tu m’écouter, espèce de buse ! Ce n’est pas seulement des documents que Kara-Selim a volés au général Vilitchkov ! mais il lui a pris encore sa nièce !…

— La belle Ivana ! s’exclama Vladimir…

— Ah ! je comprends tout, murmura La Candeur en poussant un soupir à fendre la muraille, c’est pour ça qu’on est parti si vite de Sofia ! Tu l’aimes toujours ?…

— Oui, et elle se marie demain !…

— Ah ! mon pauvre vieux ! resoupira La Candeur, t’en as une veine !…

— Hein ?

— Je te dis que t’en as une veine ! quand je pense que tu aurais pu te marier avec une Bulgare !… »

Rouletabille se fâcha tout rouge. Il adorait Ivana et il s’efforça de faire comprendre à l’entêté La Candeur qu’il y a Bulgare et Bulgare et qu’Ivana comme le général Stanislawof étaient de sincères amis de la France, mais il eut beau dire, La Candeur mettait Bulgares et Pomaks dans le même sac et maudissait en bloc tous ces pays où il fallait payer pour se faire garder par des voleurs et payer encore pour ne pas se faire couper la tête par M. Bourreau !

À ce moment, la porte se rouvrit et réapparut l’aimable majordome.

« Il ne vous coupera pas la tête, annonça cet excellent M. Priski.