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AU PALAIS ROYAL

— Oui, répondit le grand-maître de police, qui paraissait fort confus. Oui, général, il y a eu torture ! Le corps du général Vilitchkov vient d’être examiné très attentivement par les médecins légistes qui en ont fait l’autopsie. Il ne saurait y avoir de doute. Il y a eu torture.

— Eh ! parbleu !… gronda Stanislawof. Ils ont voulu le faire parler ! Ils avaient donc quelque chose à lui faire dire !… Ils savaient donc bien ce qu’ils venaient chercher ! C’est sûr ! Ils ont emporté le coffret en toute connaissance de cause !…

— Général ! s’écria Rouletabille, rien n’est moins sûr que cela ! D’abord parce que Gaulow est un homme à torturer le général Vilitchkov uniquement pour le plaisir… et ensuite parce que je ne crois pas que, même au milieu des pires tortures, le général eût parlé !…

— Moi non plus, certes, je ne le crois pas !… Mais, sans s’en rendre compte, il s’est peut-être trahi !… Rappelez-vous comme il tenait embrassé ce tabouret sur lequel était posé le coffret… La rage avec laquelle il a dû défendre ce coffret a peut-être renseigné suffisamment Gaulow… Enfin, nous ne pouvons rester dans cette incertitude… Nous sommes dans la nécessité d’agir désormais comme s’il savait !… c’est-à-dire de tout recommencer ! c’est-à-dire de gagner du temps !… Télégraphiez des dépêches optimistes, monsieur ! fit le général à Rouletabille… Messieurs, je vous remercie !… »

C’était un congé, Rouletabille eut un mouvement d’énervement… il était battu… Il voulut protester !

« Général, je vous supplie de réfléchir à ma proposition !…

— Eh ! monsieur, votre proposition tient des contes des Mille et une Nuits… elle est séduisante au premier abord et puis elle fait sourire… »

Et, se tournant vers le grand-maître de police :

« Excellence, redoublez de vigilance, mettez toute la police du royaume sur pied… Faites tout au monde pour que Gaulow ne nous échappe pas…