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SUR LES TOITS

Cette gymnastique se passait à l’intérieur du château, cependant que sur la façade extérieure, du côté de l’Ouest, on entendait gronder les eaux du torrent.

Comme nous l’avons dit, le vent avait recommencé à souffler et la nuit était redevenue noire ; en somme, le ciel se prêtait à l’entreprise hardie de Rouletabille.

La fenêtre de la chambre haute était à trois mètres environ au-dessous des « corbeaux ». Le jeune homme constata avec plaisir que cette fenêtre était dépourvue de barreaux. La hauteur à laquelle la chambre se trouvait et sa position, à l’intérieur du château, avait fait trouver sans doute une précaution de ce genre, tout à fait inutile.

Pour s’approcher de la fenêtre, comme la corde en était éloignée par la corniche des toits de quatre-vingts centimètres environ, Rouletabille donna avec le pied appuyé sur le mur, un mouvement de balancement nécessaire à cette corde à laquelle il était suspendu ; puis, mesurant bien son élan, il parvint à prendre position sur la fenêtre.

La pierre de la fenêtre n’était point large ; Rouletabille y tenait à peine. Il touchait du front de petits vitraux enclavés dans des cadres de plomb. Derrière cette fenêtre il y avait un lourd rideau entièrement tiré qui ne lui permettait point de voir quoi que ce fût de ce qui se passait à l’intérieur.

Frapper ? C’était bien imprudent !… Il était très possible qu’Ivana ne fût point seule et qu’elle fût gardée la nuit même par quelqu’une de ses femmes.

Non, Rouletabille ne frapperait pas.

Il tira de sa poche un léger outil de vitrier, car, étant parti de Sofia pour faire besogne de cambrioleur, il s’était muni de tous les ustensiles et instruments dont il pourrait avoir besoin… et, avec son diamant, il commença doucement de couper une petite vitre près de la fermeture. Un grincement, des plus légers, dénonçait son travail et il pensait bien n’être point entendu quand il vit, tout à coup, dans la pénombre intérieure de la chambre,