Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 1.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
150
LE CHÂTEAU NOIR

— C’est la plate-forme de veille, monsieur, expliqua Priski ; les autres postes de garde en bas ne nous gênent pas, mais si nous voulons revenir au donjon par les courtines et les toits, nous sommes obligés de passer devant cette sentinelle qui est bien gênante, car elle ne manquera pas de donner l’alarme.

— Je crois, en effet, dit Rouletabille, après avoir considéré du lieu assez élevé où il se trouvait la distribution générale du château, je crois bien que nous serons obligés de nous en débarrasser.

— Cela fera du bruit, monsieur, dit Priski.

— Non, monsieur. »

Rouletabille avait fait le tour de la plate-forme où il se trouvait, plate-forme qui communiquait avec le quartier des esclaves par trois corridors obscurs fermés de grilles.

À voix basse, Priski donnait les indications qu’on lui demandait : par ici les femmes, par là les hommes… Le troisième petit couloir, là au fond, correspondait avec les « conscrits » comme on dit en français, c’est-à-dire ceux dont on voulait faire des soldats. C’étaient des adolescents faméliques raflés dans les plaines d’Anatolie et que l’on soumettait, avant de les faire entrer dans le rang, à une rude éducation.

« Enfin, risquons-nous d’être surpris ici ?

— Monsieur, on n’y vient de temps en temps que pour l’oubliette… c’est vous dire que, puisqu’elle vient de fonctionner, vous pouvez être à peu près tranquille. »

Cette plate-forme qui dominait le quartier des esclaves, touchait, au Sud-Ouest, à la troisième tour de l’Ouest, qui était une grosse tour massive à quatre étages et à poivrière. Au sommet de la poivrière était dressée une énorme girouette qui grinçait sous le vent, lequel venait soudain de s’élever, poussant à nouveau de gros nuages noirs sous la lune, ce qui n’était pour déplaire à personne.

Athanase, qui avait fini de rouler les cordes fort proprement en rond comme on fait sur le pont des navires,