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LE CHÂTEAU NOIR

— Non, dit Rouletabille, jamais !…

— Si c’est des morts, fit La Candeur, moi ça ne me fait pas peur !… Je n’ai peur que des vivants… Passez-moi la lanterne… Les histoires de revenants, vous savez, ça ne m’a jamais beaucoup retourné… et je ne crains pas de passer le soir devant le cimetière. »

La Candeur faisant le brave — ce qui ne lui arrivait pas souvent — s’en fut avec la lanterne au bout du couloir, et arrivé à l’oubliette, regarda en l’air.

« Ne lâche pas ta lanterne, » lui avait heureusement crié Rouletabille ; ce qui fit qu’en effet La Candeur ne la lâcha pas ; mais il revint aussi pâle que les autres.

« Oh ! fit-il en secouant la tête… c’est bien la chose la plus affreuse que j’aie vue de ma vie, mais c’est pas tous des morts ; j’en ai entendu un qui soupirait.

— Ils peuvent soupirer comme ça pendant des jours et des jours, expliqua Priski qui reprenait du souffle, et mieux, il y en a parfois qui vous parlent comme du fond de l’autre monde… Alors, vous comprenez, quand on ne s’y attend pas, ça vous fiche un coup sur la nuque, surtout quand on est tout seul… Maintenant que vous avez vu ce que c’était, allons-nous-en ! allons-nous-en !…

— En route ! commanda Rouletabille.

— Nous rentrons ?… implora La Candeur.

— Toi, tu rentreras avec monsieur (il lui montrait Priski) et tu continueras à le surveiller.

— Je ne veux pas te laisser, Rouletabille. Qu’est-ce que je deviendrais sans toi, dans cet abominable souterrain ?

— Ne pourront passer que ceux qui ont des cordes.

— Monsieur Athanase me prêtera la sienne… »

Rouletabille réfléchit et dit :

« Au fond, tu peux nous être encore utile. Viens donc !

— Et moi ? soupira Priski, laissez-moi retourner au donjon.

— Je vous ai déjà démontré que c’était impossible, cher monsieur Priski.