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mais que pourtant, en vue de Dieu, vous agirez avec les créatures comme si vous les aimiez. Vous ne les aimerez pas comme elles doivent être aimées. Car vous êtes leur objet, comme elles sont le vôtre ; vous êtes nécessaire à leur vie, comme elles sont nécessaires à la vôtre : ce n’est donc pas un semblant d’amour qu’il leur faut, mais un amour véritable. Il faut, pour leur être véritablement utiles, et pour contribuer véritablement et normalement à leur vie et à leur perfectionnement, que vous vous sentiez uni à elles, solidaire avec elles. Hors de là, votre charité n’a aucune efficacité quant à la vie et au perfectionnement de la vie. Et la preuve, c’est qu’à mesure que votre charité s’accroît, elle se tourne de plus en plus vers Dieu seul, et de plus en plus vos semblables vous paraissent méprisables. Vous allez au ciel tout seul, et vous laissez en route la compagnie qui arrêterait votre essor. Aussi, tout le monde en convient, la dernière expression du christianisme est de considérer cette vie comme une vallée de larmes, toute créature comme méprisable, et Dieu seul comme digne d’amour. Le christianisme dans ses plus grands apôtres, dans l’évangile, comme dans S Paul, comme dans S Augustin, comme dans tous les saints sans exception, a toujours attendu, imploré, pressé la fin du monde.

chapitre iii. vraie formule de la charité ou de la solidarité mutuelle.